Photo : Dale Recinalla et son épouse, Susan. vaticannews.va
Lire le témoignage bouleversant de Dale Recinella et son expérience de mort imminente en fin d'article.
Mais tout bascule en 1988 : une grave maladie, la mort frôlée, et subitement la prise de conscience de « l'égoïsme de sa vie ». Ses collègues avocats croient qu'il est devenu fou lorsqu'ils l'aperçoivent en train d'aider dans la rue les sans-abri et les malades du sida. Un pasteur l'invite à effectuer des visites en prison, d'abord auprès des personnes atteintes de cette maladie.
C'est en aidant, comme juriste, un ami venu le solliciter pour le cas d'un condamné, qu'il prend la mesure du problème des couloirs de la mort. « Les Américains imaginent que leur machine à tuer est bien huilée, mais quand on se plonge dans les dossiers, c'est le désordre ! » Exécution d'innocents, discrimination raciale, discrimination par l'argent [...].
Une grosse croix autour du cou, Frère Dale, comme l'appellent les prisonniers, travaille la semaine comme aumônier depuis 1998. Bénévole, à 52 ans. Sa femme Susan, psychiatre, assure les revenus du couple et l'aide. « À nous deux, on a 11 filleuls dans les couloirs de la mort », annonce-t-il avec fierté. Dale Recinella prépare au baptême et donne la communion à travers les barreaux. « La plupart sont en dépression très profonde, avec des envies de suicide. Je parle très peu, je les écoute me parler de leur famille, de leur enfance. » Le soir, chez lui, il écoute aussi les familles des victimes de ces meurtriers. « Je vois l'histoire des deux côtés. Je ressens toujours un tiraillement. »
Trois semaines avant son exécution, tout condamné est transféré du couloir, où certains ont passé plus de trente ans, à la « maison de la mort », dans la prison voisine. Frère Dale l'accompagne jusque dans ses dernières heures. À l'extérieur, Susan soutient pendant ce temps les proches du prisonnier. « Durant l'exécution, le personnel, les gardiens, qui ont tant côtoyé le condamné, ont du mal à cacher leurs larmes », observe-t-il. De retour à la maison, le couple ne peut rien faire d'autre que prier. « La peine de mort ne soulage vraiment personne », conclut-il.
Dale Recinella est confiant que la peine capitale finira par disparaître, y compris en Floride. [...]
Sébastien Maillard
Source : la-croix.com
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Témoignage de Dale Recinella
Un prestigieux avocat sans aucune défense
Traduction libre et partielle du témoignage de Dale Recinella, du livre de Christine Watkins The Warning: Testimonies and Prophecies of the Illumination of Conscience.
En mars 1986. Susan et moi avons rencontré l'entrepreneur de notre nouvelle propriété. Il était temps de commencer les travaux de construction. Je lui remis le chèque de cinquante mille dollars exigé par le contrat pour lui permettre de commencer le chantier. Nous irions célébrer cela au cours d'un diner, plus tard dans la soirée, après avoir assisté à la messe du soir dans notre nouvelle paroisse du Tallahassee en Floride.
Depuis le changement de cabinet juridique à Miami en Février 1984, mes heures de travail ont explosé. Notre intense vie spirituelle qui donnait un équilibre à notre quotidien en 1983 semblait s'être affaiblie à mesure que la pression de nos enfants et celle de notre carrière accaparaient notre emploi du temps et nos ressources. Nous n'aurions pu imaginer qu'une fois arrivés à l'église, le soir même de la signature du contrat de construction de la maison de nos rêves, nous serions confrontés à l'Évangile du jeune homme riche en Marc 10: 17-25 :
Jésus se mettait en route quand un homme accourut et, tombant à ses genoux, lui demanda : « Bon Maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle en héritage ? »
Jésus lui dit : « Pourquoi dire que je suis bon ? Personne n'est bon, sinon Dieu seul.
Tu connais les commandements : Ne commets pas de meurtre, ne commets pas d'adultère, ne commets pas de vol, ne porte pas de faux témoignage, ne fais de tort à personne, honore ton père et ta mère. »
L'homme répondit : « Maître, tout cela, je l'ai observé depuis ma jeunesse. »
Jésus posa son regard sur lui, et il l'aima. Il lui dit : « Une seule chose te manque : va, vends ce que tu as et donne-le aux pauvres ; alors tu auras un trésor au ciel. Puis viens, suis-moi. »
Mais lui, à ces mots, devint sombre et s'en alla tout triste, car il avait de grands biens.
Alors Jésus regarda autour de lui et dit à ses disciples : « Comme il sera difficile à ceux qui possèdent des richesses d'entrer dans le royaume de Dieu ! »
Les disciples étaient stupéfaits de ces paroles. Jésus reprenant la parole leur dit : « Mes enfants, comme il est difficile d'entrer dans le royaume de Dieu !
Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d'une aiguille qu'à un riche d'entrer dans le royaume de Dieu. »
Bien que ce récit ait été lu à la messe de nombreuses fois par le passé, nous avions l'impression de l'entendre ce soir-là pour la toute première fois. Le diner qui suivit, pour célébrer notre nouveau contrat, n'allait pas se dérouler comme prévu.
« Crois-tu qu'Il pensait ce qu'Il disait ? »
« Qui ? L'entrepreneur ? Est-ce que l'entrepreneur pensait ce qu'Il disait ? »
« Non, » lui répondis-je « pas l'entrepreneur... Jésus. Crois-tu que Jésus pensait ce qu'Il disait ? »
« Qu'a-t-Il dit ? Que veux-tu dire ? »
« Ce qu'Il a dit dans la lecture de l'Évangile ce soir. »
Susan commençait à comprendre. Elle posa sa fourchette et m'écouta attentivement.
« Crois-tu que Jésus pensait ce qu'Il disait ce soir dans l'Évangile ? » Je me penchai vers elle pour parler à voix basse, conscient que les autres clients du restaurant risqueraient de me prendre pour un dingue en m'entendant poser une telle question.
Susan haussa les épaules. « Quelqu'un croit-il que Jésus le pensait de façon littérale ? »
« Eh bien, j'imagine que c'est le cas des prêtres et des religieux, » lui répondis-je, sachant que beaucoup de catholiques depuis des siècles pensent que le sens littéral des évangiles ne s'applique qu'à ceux qui sont appelés à la vie religieuse. « Mais le type à qui Jésus s'adressait dans l'Évangile ce soir n'était pas religieux. Il était comme toi et moi. »
« Je ne sais pas. » Susan baissa à son tour instinctivement la voix. « Peut-être devrions-nous y réfléchir. »
Nous commençâmes donc par lire l'Évangile ensemble chaque soir. Nous étions si surpris du défi que semblait lancer Jésus par ces paroles que nous n'essayâmes même plus de soulever la question pendant six mois. Au lieu de cela, nous priâmes chacun de son côté à la lumière de Sa parole, pour tenter de trouver une réponse.
En septembre 1986, plusieurs semaines après avoir emménagé dans notre spacieuse nouvelle maison de Floride, le moment était venu de nous asseoir pour comparer nos notes respectives.
« Bon, je ne sais pas trop qu'en penser, mais j'ai ma réponse. » Susan s'adossa sur sa chaise devant la cheminée de l'alcôve qui constituait une partie de notre grande chambre de pas moins de 365 mètres carrés.
« Moi aussi. » Mon acquiescement suivi d'un haussement des épaules lui fit comprendre que j'étais bloqué dans la même impasse. « Qui commence ? »
« Je vais commencer. » Susan ouvrit sa Bible et parcourut les pages jusqu'à l'évangile de Matthieu et trouva la fin du Sermon sur la Montagne, Matthieu 7: 24-27 :
Ainsi, celui qui entend les paroles que je dis là et les met en pratique est comparable à un homme prévoyant qui a construit sa maison sur le roc.
La pluie est tombée, les torrents ont dévalé, les vents ont soufflé et se sont abattus sur cette maison ; la maison ne s'est pas écroulée, car elle était fondée sur le roc.
Et celui qui entend de moi ces paroles sans les mettre en pratique est comparable à un homme insensé qui a construit sa maison sur le sable.
La pluie est tombée, les torrents ont dévalé, les vents ont soufflé, ils sont venus battre cette maison ; la maison s'est écroulée, et son écroulement a été complet. »
« Je ne sais pas ce qu'en pensent les autres. » répondit-elle en fermant sa Bible. « Mais il me paraît évident que Jésus pensait ce qu'Il disait. »
« J'en arrive à la même conclusion. Alors que faisons-nous maintenant ? » Je fis un mouvement circulaire de la main droite pour indiquer notre monumentale maison. « Et de ceci ? » De la main gauche je soulevai le livre de la Parole de Dieu.
« Dale, je n'en ai pas la moindre idée. »
« Moi non plus. »
« Il ne nous reste plus qu'à prier, Dale. Ce ne sera pas facile. »
Susan n'aurait jamais cru si bien dire. Malgré nos efforts pour nous rendre disponibles pour le service du Royaume de Dieu, le même obstacle se présentait sans cesse sur notre chemin, la limite de temps non extensible. Il n'y avait tout simplement pas assez de temps. Tout notre temps était consacré à courir après l'argent pour parvenir à maintenir notre train de vie.
Nous continuâmes à prier pour être éclairés par Dieu.
***
En novembre 1986, je me réveillai d'un terrible cauchemar en hurlant, les draps baignés de sueur. Susan se réveilla aussitôt et s'assit dans le lit à mes côtés, effrayée par mes cris de terreur.
« Dale, que s'est-il passé ? Qu'est-ce qui t'a fait hurler ainsi ? »
« Un rêve. Un horrible cauchemar. C'était incroyablement réel. »
« Parle-moi de ce rêve, » me demanda Susan.
« J'étais en dehors de notre chambre, du côté ouest de la maison, ratissant les feuilles avec les enfants. C'était la fin de l'après-midi, une journée très agréable. Tout le monde était de bonne humeur. Je me disais en moi-même combien j'étais comblé. Puis soudain... » Je fis une pause, cherchant mes mots.
« Ensuite que s'est-il passé ? » me demanda Susan.
« Ensuite, j'ai entendu une voix. C'était plus qu'une voix, comme une mélodie — mais mélodie n'est pas encore assez descriptif. C'était le plus doux, le plus beau son que j'ai jamais entendu de ma vie. Et il venait du côté où le soleil se couche. Tout en moi savait qu'il me fallait suivre cette voix. Donc j'ai fait mine d'avancer dans sa direction. Mais j'en étais incapable. Je ne pouvais marcher vers elle parce que quelque chose me retenait. »
« Dale, qu'est-ce qui te retenait ? »
« Je ne parvenais pas à bouger la jambe. Je regardai alors vers le bas, et je vis une énorme chaîne enroulée autour de ma jambe. Les maillons d'acier massifs de cette chaîne reliaient ma cheville à la maison. La chaîne était encastrée dans les briques de la maison, juste derrière notre cheminée. »
« Et qu'as-tu fait ensuite, Dale ? »
« Je tentai de rompre cette chaîne. J'essayai comme un dingue de briser les maillons d'acier, au point de tenter de me casser la jambe pour parvenir à m'en défaire. Mais la chaîne ne bougeait pas. Et ensuite... » Je frémissais en me remémorant ce rêve, ce moment de total désespoir et de complète désespérance qui envahissait tous mes sens. « Et alors, la voix a commencé à faiblir. Je ne pouvais la rejoindre. La voix s'en allait. J'étais saisi d'horreur parce que la voix s'éloignait. Ce n'était pas juste ce désir de me débarrasser de mes chaînes. C'était uniquement cette voix. Elle était si belle que je ne pouvais m'imaginer ne pas me précipiter pour la rejoindre, pour être auprès d'elle.
J'essayai alors d'arracher la chaîne du mur. Je tentai même de tirer toute cette fichue maison derrière moi. Mais c'était futile. Tandis que je me tenais là, tremblant et pleurant, la voix s'atténuait, le soleil se couchait, et finalement, il fit complètement noir. La voix était partie. Le froid était absolu. Dans mon rêve, je savais qu'il n'y aurait pas de seconde chance. Je l'avais perdue pour toujours. J'ai hurlé et c'est alors que je me suis réveillé. »
Susan me tenait contre elle en priant doucement.
« Chéri, » me murmura-t-elle enfin. « Je pense que Dieu a fini par nous donner la réponse qu'on attendait. Sans doute qu'on ne peut pas avoir tout ceci et Son Royaume. Peut-être devons-nous choisir. »
Il est difficile de décrire le sentiment et l'émotion qui m'envahirent, ainsi que le choc qui me saisit en réalisant que non seulement Jésus pensait ce qu'Il disait dans l'Évangile, de façon générale, mais qu'Il le pensait sans doute aussi pour nous personnellement.
***
Un an et demi plus tard, Dieu allait à nouveau me visiter. Je n'avais jamais entendu cet avertissement selon lequel il ne faut pas manger d'huitres crues au cours d'un mois dont le nom ne comporte pas la lettre R. (Ndtr, cet avertissement était sans doute valable dans les années '80, où la culture des huitres était bien différente d'aujourd'hui. Pendant les mois d'été des bactéries pouvaient en effet être présentes dans les huitres, certaines étant mortelles pour l'homme.) Dès l'instant où je mordis dans l'huitre, je compris que quelque chose n'allait pas. Elle n'avait pas un goût normal.
« Monsieur Recinella... Dale. » Le docteur se racla la gorge. « C'est fini. Vous ne survivrez pas à cette nuit. [...] »
Susan était complètement figée, à l'exception de ses mains qui serraient les miennes.
« Monsieur Recinella, vous devez mettre vos affaires en ordre. »
(...)
Avant de perdre conscience, j'embrassai Susan et lui fis mes adieux. Elle était en larmes. Elle tenait à rester à mon chevet jusqu'à la fin.
La fièvre monta excessivement haut. Je ne pouvais plus garder les yeux ouverts. Je le voulais mais ne le pouvais pas. La dernière chose que je vis fut Susan assise à côté du lit, me regardant comme si la force de son regard pouvait me garder auprès d'elle. Mais il ne le pouvait pas. La fièvre avait gagné. Mes yeux se fermèrent. Il n'y avait plus que l'obscurité.
Tout à coup, je me retrouvai debout au milieu d'une pièce. Ce n'était pas ma chambre d'hôpital. Il faisait noir, à l'exception d'une lumière qui émanait d'une personne juste devant moi. Je le reconnus immédiatement. C'était Jésus. Il ressemblait exactement à cette image qui était accrochée dans ma chambre quand j'étais enfant. Il irradiait une chaleur indescriptible, qui pénétrait chaque recoin de la pièce jusque dans mon propre corps. Il me regardait attentivement, mais Il ne souriait pas. Il était profondément attristé. Des larmes coulaient sur Son visage. Il pleurait doucement.
« Dale, » me dit-Il en tendant Ses bras vers moi, tandis qu'Il secouait doucement la tête avec tristesse et déception. « Qu'as-tu fait de Mes dons ? »
L'avocat en moi répondit par instinct de défense, « Quels dons ? »
Ecoutant ma tentative habile de me défendre, Jésus n'avait pas l'air fâché ou perturbé, simplement triste, très triste. Il me détailla chaque aspect de mon intelligence, mon éducation, ma personnalité, mon tempérament qui avaient contribué à mes succès et réussites sur terre. Mais je ne comprenais toujours pas où Il voulait en venir.
« J'ai travaillé dur. J'ai tout fait pour que mes enfants aillent dans les meilleures écoles. Nous vivons dans un quartier sûr ; ma famille est en sécurité... » Le ton manifestement sur la défensive de ma voix me fit réaliser que j'étais en train d'argumenter avec quelqu'un. Avec qui ? Jésus ne cherchait pas à argumenter avec moi. Avec qui étais-je en train d'argumenter ? Avec moi-même ?
Finalement, Il laissa retomber Ses bras. Il n'avait pas une expression de condamnation. C'était plutôt une expression de consternation, celle d'un parent qui a répété quelque chose à son fils des milliers de fois et ne parvient pas à comprendre comment son enfant n'a toujours pas compris. Il me parla alors avec un ton suppliant qui frôlait l'exaspération.
« Dale, qu'as tu fait pour tous Mes enfants qui souffrent ? »
A ce moment, c'était comme si, soudainement, une vague de deux mètres de haut, complètement invisible mais tangible, me submergeait. Je pouvais en ressentir la substance, et elle était acide et corrosive à l'extrême. Je sentais que mon être même était sur le point de s'y dissoudre.
D'une certaine façon, intuitivement, je compris que cet acide était la honte, la honte de l'égoïsme et du narcissisme qu'avait été ma vie. (...)
« Je t'en prie ! » Je puisai l'énergie nécessaire pour ma dernière supplication, tandis que Jésus était toujours devant moi, en pleur. « Je t'en prie, je te le promets. Donne-moi une autre chance et je ferai les choses différemment. »
Et ce fut tout. La vague était partie. Jésus était parti. La pièce était plongée dans l'obscurité.
Il était environ 6h30 le matin suivant quand j'ouvris les yeux. Susan était restée à mes côtés toute la nuit, s'attendant à me voir mourir.
« Je ne suis pas mort, n'est-ce pas ? » Il y eut un long moment avant qu'elle ne réponde.
« Eh bien, tu as une mine terrible, mais visiblement tu n'es pas mort. »
Je n'avais plus de fièvre. Les bactéries étaient parties. Le docteur me dit que c'était tout simplement impossible. Trois ans plus tard, la bactérie fut identifiée comme étant la vibrio vulnificus, une bactérie mangeuse de chairs qui provoque des empoisonnements alimentaires et des infections mortels. C'est carrément fatal si nous y sommes exposés ne fut-ce que par simple contact avec la peau. Et j'en avais avalé.
Toujours est-il que j'ai eu la réponse à ma prière. Jésus pensait ce qu'Il disait.