Comprendre François


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Catégorie : Église et papauté

Auteur : Mark Mallett

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Le jour où le Pape Benoît XVI renonça à sa charge pétrinienne, j'ai ressenti à plusieurs reprises dans la prière les mots suivants : Vous êtes entrés dans des jours dangereux. Le sens de ces mots était que l'Église s'apprêtait à entrer dans une période de grande confusion.

Et c'est alors qu'entra en scène le Pape François.

De façon très similaire au pontificat de Saint Jean-Paul II, notre nouveau pape a bousculé un statu quo fortement enraciné. D'une manière ou d'une autre, il a mis au défi tous les membres de l'Église. Plusieurs lecteurs, cependant, m'ont écrit en me confiant leur inquiétude : d'après eux, le Pape François s'éloigne de la foi par ses gestes peu orthodoxes, ses remarques franches et directes et ses déclarations visiblement contradictoires...

Un « changement radical » ?

Tels furent les mots utilisés par les médias suite au long entretien en trois parties du Pape François avec le Père Antonio Spadaro s.j., publié en septembre 2013, au début de son pontificat. [1] L'échange s'était déroulé au cours de trois rencontres. Ce qui attira l'attention des médias fut ses propos au sujet des « sujets brûlants » qui ont entraîné l'Église catholique dans une véritable guerre culturelle :

Nous ne pouvons pas insister seulement sur les questions liées à l'avortement, au mariage homosexuel et à l'utilisation de méthodes contraceptives. Ce n'est pas possible. Je n'ai pas beaucoup parlé de ces choses, et on me l'a reproché. Mais lorsqu'on en parle, il faut le faire dans un contexte précis. [L'enseignement] de l'Église [est clair,] et je suis fils de l'Église, mais il n'est pas nécessaire d'en parler en permanence

—cité dans la-croix.com ; Télécharger l'entretien au format PDF ; entre crochets : traduction depuis l'anglais

Ses paroles furent interprétées comme un "changement radical" par rapport à ses prédécesseurs. Encore une fois, plusieurs médias ont qualifié le Pape Benoît XVI de pontife dur, froid et rigide sur le plan doctrinal. Et pourtant, les paroles du Pape François sont sans équivoque : « L'enseignement de l'Église est clair, et je suis fils de l'Église... », c'est-à-dire que la position morale de l'Église sur ces questions reste ferme (lire « Ce que le pape François a dit de l'avortement »). Bien plus, le Saint-Père, se tenant à la proue de la Barque de Pierre, observant ces immenses changements auxquels fait face notre monde, entrevoit une nouvelle voie, plus stratégique, pour l'Église.

Une maison pour les blessés

Il reconnaît que nous vivons aujourd'hui dans une culture où beaucoup d'entre nous sont profondément blessés par le péché et ses conséquences dramatiques dans la société. Nous aspirons avant tout à être aimés... à nous savoir aimés au milieu de nos faiblesses, de nos dysfonctionnements et de nos péchés. À cet égard, le Saint-Père voit le cours de l'Église aujourd'hui sous un jour nouveau :

Je vois avec clarté que la chose dont a le plus besoin l'Église aujourd'hui c'est la capacité de soigner les blessures et de réchauffer le coeur des fidèles, la proximité, la convivialité. Je vois l'Église comme un hôpital de campagne après une bataille. Il est inutile de demander à un blessé grave s'il a du cholestérol ou si son taux de sucre est trop haut ! Nous devons soigner les blessures. Ensuite nous pourrons aborder le reste. Soigner les blessures, soigner les blessures… Il faut commencer par le bas.

—Ibid.

Nous sommes au milieu d'une guerre culturelle. Nous pouvons tous voir cela. Du jour au lendemain, le monde s'est revêtu d'un manteau arc-en-ciel. Le monde a si rapidement et universellement embrassé « l'avortement, le mariage homosexuel et l'utilisation de méthodes contraceptives » que ceux qui s'y opposent risquent, dans un proche avenir, de faire face à la possibilité de la persécution. Les fidèles sont accablés, dépassés et se sentent même trahis sur de nombreux fronts. Mais, selon le Vicaire de Christ, pour faire face à cette réalité aujourd'hui, et dans les années à venir, une nouvelle approche est nécessaire :

Le plus important est la première annonce : “Jésus Christ t'a sauvé !” Les ministres de l'Église doivent être avant tout des ministres de miséricorde.

—Ibid.

C'est vraiment une belle réflexion qui fait directement écho à la « tâche divine » dont parlait Saint Jean-Paul II, consistant à proclamer au monde, à travers les écrits de Sainte Faustine, le message de la miséricorde, et à la manière simple et belle de Benoît XVI de placer la rencontre avec Jésus au centre de notre vie de foi. Comme il le disait lors d'une réunion avec les évêques d'Irlande en 2006 :

Très souvent, le témoignage à contre-courant de l'Eglise est mal interprété, comme quelque chose de dépassé et de négatif dans la société actuelle. C'est pourquoi il est important de souligner la Bonne Nouvelle, le message de l'Evangile qui donne et qui accroît la vie (cf. Jn 10, 10). Bien qu'il soit nécessaire de s'exprimer avec force contre les maux qui nous menacent, nous devons corriger l'idée [selon laquelle] le catholicisme n'est qu'"une série d'interdictions".

—PAPE BENOÎT XVI, Discours aux évêques irlandais; CITÉ DU VATICAN, 29 octobre 2006 ; Vatican.va

Le danger, avait déclaré François, est d'avoir une vision trop étroite, de perdre de vue le contexte plus large.

L'Église s'est parfois laissé enfermer dans des petites choses, [des règles rigides et obstinées].

— Interview du Pape François aux revues culturelles jésuites, réalisée en août 2013 par le Père Antonio Spadaro, s.j. ; télécharger l'entretien au format PDF ; entre crochets : traduction depuis l'anglais

C'est peut-être pour cette raison que le Pape François a refusé de se laisser enfermer dans de « petites choses » au début de son pontificat, lorsqu'il lava les pieds de douze détenus, dont deux femmes. Cela enfreignit une norme liturgique (du moins telle que suivie dans certains endroits). Le Vatican défendit le geste de François en le déclarant « absolument licites » étant donné qu'il ne s'agissait pas d'un sacrement. En outre, le porte-parole du Pape souligna qu'il s'agissait d'une prison commune composée d'hommes et de femmes, et que laisser à l'écart ces dernières aurait paru « étrange ».

Cette communauté se concentre sur des choses simples et essentielles ; ses membres n'étaient pas des experts en liturgie. Leur laver les pieds était un geste important pour présenter l'esprit de service et d'amour du Seigneur.

—Père Federico Lombardi, porte-parole du Vatican, Religious News Service, le 29 mars 2013

Le Pape a agi selon « l'esprit de la loi », par opposition à la « lettre de la loi ». Ce faisant, il est certain qu'il a hérissé quelques plumes — à l'instar d'un certain homme juif qui, il y a 2000 ans, avait guéri le jour du Sabbat, diné avec des pécheurs, et côtoyé et s'était laissé toucher par des femmes impures. La loi a été faite pour l'homme, non pas l'homme pour la loi, a-t-Il dit une fois. [2] Les normes liturgiques sont là pour apporter un certain ordre, une valeur symbolique, un langage et de la beauté à la liturgie. Mais s'ils ne servent pas l'amour, pourrait dire Saint Paul, ils ne « valent rien ». Dans le cas présent, on peut soutenir que le Pape François a démontré que la suspension d'une norme liturgique était nécessaire pour le bien du respect de la « loi de l'amour. »

Un nouvel équilibre

Par ses gestes, le Saint-Père tente de créer un « nouvel équilibre », comme il nous l'expliquait. Non pas en négligeant la vérité, mais en réorganisant nos priorités.

Les ministres de l'Église doivent être miséricordieux, prendre soin des personnes, les accompagner comme le bon Samaritain qui lave et relève son prochain. [C'est l'essence même de l'Évangile]. Dieu est plus grand que le péché. Les réformes structurelles ou organisationnelles sont secondaires, c'est-à-dire qu'elles viennent dans un deuxième temps. La première réforme doit être celle de la manière d'être. Les ministres de l'Évangile doivent être des personnes capables de réchauffer le coeur des personnes, de dialoguer et cheminer avec elles, de descendre dans leur nuit, dans leur obscurité, sans se perdre.

la-croix.com ; Télécharger l'entretien au format PDF

Oui, une "brise fraîche", un nouvel élan de l'amour du Christ entre et passe en nous et à travers nous. [3] Mais « sans se perdre », c'est-à-dire sans risquer « d'être soit trop rigide, soit trop laxiste » [4], Davantage encore, notre témoignage doit prendre une forme audacieuse et concrète.

Au lieu d'être seulement une Église qui accueille et qui reçoit en tenant les portes ouvertes, efforçons-nous d'être une Église qui trouve de nouvelles routes, qui est capable de sortir d'elle-même et d'aller vers celui qui ne la fréquente pas... Nous devons annoncer l'Évangile sur chaque route, prêchant la bonne nouvelle du Règne et soignant, aussi par notre prédication, tous types de maladies et de blessures...

—Ibid.

Comme beaucoup de mes lecteurs le savent, j'écris souvent des articles parlant de cette « confrontation finale » qui a lieu à notre époque, de la lutte entre la culture de la vie et la culture de mort. La réaction de mes lecteurs par rapport à ces articles a été extrêmement positive. Mais lorsque j'ai écrit The Desolate Garden il y a quelques années, cela a profondément touché beaucoup d'entre vous. Nous recherchons tous l'espérance et la guérison, la grâce et la force nécessaires pour affronter ces temps difficiles. C'est là l'essentiel. Le reste du monde n'est pas différent ; en fait, plus les ténèbres s'intensifient, plus il devient urgent et opportun de proposer à nouveau l'Évangile d'une manière profondément claire et simple.

L'annonce de type missionnaire se concentre sur l'essentiel, sur le nécessaire, qui est aussi ce qui passionne et attire le plus, ce qui rend le coeur tout brûlant, comme ce fut le cas pour les disciples d'Emmaüs. Nous devons donc trouver un nouvel équilibre, autrement l'édifice moral de l'Église risque lui aussi de s'écrouler comme un château de cartes, de perdre la fraîcheur et le parfum de l'Évangile. L'annonce évangélique doit être plus simple, profonde, irradiante. C'est à partir de cette annonce que viennent ensuite les conséquences morales.

—Ibid.

Ainsi, le Pape François ne néglige pas les « conséquences morales ». Mais en faire notre objectif principal aujourd'hui risque de stériliser l'Église et d'éloigner les pécheurs. Si Jésus était entré dans les villes prêchant le Paradis ou menaçant de l'Enfer plutôt que guérissant, les âmes auraient fui. Le Bon Berger savait qu'il devait avant tout panser les plaies de la brebis perdue et la porter sur Ses épaules, et ensuite celle-ci serait en mesure de l'écouter. Jésus entra dans les villes en guérissant les malades, chassant les démons, ouvrant les yeux aux aveugles. Et ensuite, il partagea avec eux l'Évangile, tout en leur enseignant qu'il y a des conséquences morales à ne pas le vivre. De cette façon, Jésus est devenu un refuge pour les pécheurs. De la même façon, l'Église doit être reconnue à nouveau comme une maison pour les blessés.

Cette Église avec laquelle nous devons [être en communion de pensée], c'est la maison de tous, pas une petite chapelle qui peut contenir seulement un petit groupe de personnes choisies. Nous ne devons pas réduire le sein de l'Église universelle à un nid protecteur de notre médiocrité.

—Ibid.

Ce n'est pas significativement différent de la pensée de Jean-Paul II ou de Benoît XVI ; chacun à son époque défendit héroïquement la vérité. Il en est de même pour François. D'où ce genre de titre dans la presse : « Le Pape François dénonce l'avortement comme "culture du déchet" » [5]. Mais les vents ont tourné ; les temps ont changé ; l'Esprit souffle d'une manière nouvelle. N'est-ce pas ce que le Pape Benoît XVI lui-même disait de façon prophétique être nécessaire, et qui le contraignit à se retirer ?

Et ainsi, François a tendu une branche d'olivier, même aux athées, suscitant encore de nouvelles controverses...

Même les athées

La Seigneur nous a tous rachetés, tous, par le Sang du Christ : tous, pas seulement les catholiques. Tous ! "Père, et les athées ?" Même eux. Tous ! Et ce Sang fait de nous des enfants de Dieu de première classe ! Nous sommes créés fils à l'image de Dieu, et le Sang du Christ nous a tous rachetés ! Et nous tous nous avons le devoir de faire le bien. Et ce commandement fait à tous de faire le bien est une belle voie vers la paix.

—PAPE FRANCOIS, Homélie, « Engageons-nous à faire le bien ! », le 22 mai 2013

Plusieurs commentateurs ont conclu à tort que le Pape suggérait qu'un athée pouvait aller droit au Ciel s'il faisait de bonnes actions [6], ou que tout le monde est sauvé, peu importe ce en quoi l'on croit. Mais une lecture attentive des paroles du Pape ne suggère ni l'un ni l'autre, et en fait, souligne que ses propos sont non seulement vrais, mais aussi conformes à l'Écriture.

Premièrement, chaque être humain a effectivement été racheté par le sang du Christ versé pour tous sur la Croix. C'est précisément ce que Saint Paul a écrit :

En effet, l'amour du Christ nous saisit quand nous pensons qu'un seul est mort pour tous, et qu'ainsi tous ont passé par la mort. Car le Christ est mort pour tous, afin que les vivants n'aient plus leur vie centrée sur eux-mêmes, mais sur lui, qui est mort et ressuscité pour eux.

2 Co 5: 14-15

Cela a fait l'objet de l'enseignement constant de l'Église catholique :

L'Église, à la suite des apôtres, enseigne que le Christ est mort pour tous les hommes sans exception : « Il n'y a, il n'y a eu et il n'y aura aucun homme pour qui le Christ n'ait pas souffert. »

Catéchisme de l'Église catholique, n° 605

Bien que tous aient été rachetés par le sang du Christ, tous ne sont pas sauvés. Pour reprendre les mots de Saint Paul, tous sont morts, mais tous n'acceptent pas de ressusciter à une nouvelle vie en Jésus Christ afin d'avoir « leur vie centrée, non plus sur eux-mêmes, mais sur Lui... ». Au lieu de cela, ils mènent une vie égoïste, centrée sur elle-même — une voie large et aisée qui mène à la perdition.

Alors, que dit le Pape ? Prêtez attention au contexte de ses paroles, un peu plus tôt dans son homélie :

Le Seigneur nous a créés à Son image et à Sa ressemblance, et nous sommes l'image du Seigneur, et Il fait des oeuvres bonnes et nous avons tous ce commandement au fond du coeur : faites le bien et ne faites pas le mal. Chacun de nous. « Mais, Père, ce n'est pas catholique ! [Un athée] ne peut pas faire des oeuvres bonnes. » Oui il le peut. Non... il le doit ! Parce qu'il a ce commandement en lui. Au lieu de cela, cette "fermeture" qui suppose que tous ceux qui sont à l'extérieur ne peuvent pas accomplir de bonnes oeuvres est un mur qui mène à la guerre et aussi à ce que certaines personnes ont pu concevoir au cours de l'histoire : tuer au nom de Dieu.

—PAPE FRANCOIS, Homélie, « Engageons-nous à faire le bien ! », le 22 mai 2013

Chaque être humain est créé à l'image de Dieu, à l'image de l'amour, c'est pourquoi nous avons tous « ce commandement au fond du coeur : faites le bien et ne faites pas le mal. » Si tout le monde suit ce commandement de l'amour — qu'il soit chrétien ou athée ou de tout autre croyance — alors nous pourrons trouver le chemin de la paix, le chemin de la "rencontre" où le vrai dialogue peut avoir lieu. Ce fut précisément le témoignage de Sainte Mère Teresa. Elle ne faisait aucune distinction entre ces hindous ou musulmans, athées ou croyants, allongés dans les caniveaux de Calcutta. Elle voyait en chacun le visage de Jésus. Elle aimait tout le monde comme si c'était Jésus. En ce lieu d'amour inconditionnel, la semence de l'Évangile était déjà en train d'être semée.

Si, chacun à son propre niveau, fait du bien aux autres, si nous nous rencontrons en chemin, posons des actes bons, si nous avançons progressivement, avec douceur, nous créerons cette culture de la rencontre : nous avons tellement besoin de cela. Nous devons nous rencontrer en faisant le bien. « Mais je ne crois pas, mon Père, je suis athée ! » Mais fais le bien : nous nous rencontrerons en chemin.

Ibid.

C'est tout autre chose que de dire que nous nous rencontrerons tous au Paradis — le Pape François n'a jamais dit cela. Mais si nous choisissons de nous aimer les uns les autres et parvenons à un consensus moral sur le « bien », c'est en effet le fondement de la paix et du dialogue authentique et le début du « chemin » menant à la « vie ». (Parfois sans même qu'un athée ne sache que c'est d'une part le Christ à qui il aura fait du bien à travers l'amour pour ses frères, et d'autre part que c'est Son commandement — qu'un athée peut discerner à travers sa conscience — qu'il aura suivi - cf. Mt 25: 40, ndt) C'est précisément ce que prêchait le Pape Benoît XVI lorsqu'il avait averti que la perte même d'un consensus moral n'était pas synonyme de paix, mais de désastre pour l'avenir.

C'est seulement s'il existe un tel consensus sur l'essentiel, que les constitutions et le droit peuvent fonctionner. Ce consensus de fond provenant du patrimoine chrétien est en péril... En réalité, c'est un aveuglement de la raison pour ce qui est essentiel. Combattre cet aveuglement de la raison et lui conserver la capacité de voir l'essentiel, de voir Dieu et l'homme, ce qui est bon, et ce qui est vrai, est l'intérêt commun qui doit unir tous les hommes de bonne volonté. L'avenir du monde est en jeu.

—PAPE BENOÎT XVI, Discours à la Curie romaine, le 20 décembre 2010 ; Vatican.va

« Qui suis-je pour juger ? »

Ces mots ont détonné dans le monde entier tel un coup de canon. Le pape fut interrogé au sujet de ce qu'on appelle un « lobby homosexuel » au Vatican, un groupe de prêtres et d'évêques qui seraient activement homosexuels et se couvriraient l'un l'autre.

Le Pape François a déclaré qu'il était important de « faire la distinction entre la personne homosexuelle et celle qui fait partie d'un lobby gay. »

« Si une personne est gay et cherche le Seigneur et qu'elle est de bonne volonté, mais qui suis-je pour la juger ? Le Catéchisme de l'Église catholique explique cela très clairement. Il dit qu'il ne faut pas marginaliser ces personnes, elles doivent être intégrées dans la société...

Catholic News Service, 31 juillet 2013

Les chrétiens évangéliques et les homosexuels s'approprièrent ces paroles — les premiers suggérant que le Pape excusait l'homosexualité, les seconds qu'il l'approuvait. Encore une fois, une lecture sereine des paroles du Saint-Père n'indique rien de tout cela.

Tout d'abord, le Pape a distingué ceux qui sont activement homosexuels — le « lobby gay » — et ceux qui luttent avec leur orientation homosexuelle mais qui « cherchent le Seigneur » et sont « de bonne volonté ». Il n'est pas possible de chercher le Seigneur et d'être de bonne volonté si d'autre part l'on pratique activement l'acte homosexuel. Le Pape François l'a clairement exprimé en se référant à l'enseignement du Catéchisme sur le sujet (que peu de commentateurs ont apparemment pris la peine de lire).

S'appuyant sur la Sainte Écriture, qui les présente comme des dépravations graves (cf. Gn 19, 1-29 ; Rm 1, 24-27 ; 1 Co 6, 10 ; 1 Tm 1, 10), la Tradition a toujours déclaré que "les actes d'homosexualité sont intrinsèquement désordonnés". Ils sont contraires à la loi naturelle. Ils ferment l'acte sexuel au don de la vie. Ils ne procèdent pas d'une complémentarité affective et sexuelle véritable. Ils ne sauraient recevoir d'approbation en aucun cas.

Catéchisme de l'Église catholique, n° 2357

Le catéchisme explique « très clairement » la nature de l'acte homosexuel. Mais il explique également comment une personne de « bonne volonté » qui lutte avec son orientation sexuelle doit être accueillie.

Un nombre non négligeable d'hommes et de femmes présente des tendances homosexuelles foncières. Cette propension, objectivement désordonnée, constitue pour la plupart d'entre eux une épreuve. Ils doivent être accueillis avec respect, compassion et délicatesse. On évitera à leur égard toute marque de discrimination injuste. Ces personnes sont appelées à réaliser la volonté de Dieu dans leur vie, et si elles sont chrétiennes, à unir au sacrifice de la croix du Seigneur les difficultés qu'elles peuvent rencontrer du fait de leur condition.

Les personnes homosexuelles sont appelées à la chasteté. Par les vertus de maîtrise, éducatrices de la liberté intérieure, quelquefois par le soutien d'une amitié désintéressée, par la prière et la grâce sacramentelle, elles peuvent et doivent se rapprocher, graduellement et résolument, de la perfection chrétienne.

—CEC n° 2358-2359

L'approche du Pape François fait directement écho à cet enseignement. Bien sûr, sans en donner le contexte dans sa déclaration, le Saint Père laissa la porte ouverte au malentendu — mais uniquement pour ceux qui n'ont pas pris connaissance de cet enseignement de l'Église que François a directement souligné.

Dans mon propre ministère, à travers certains échanges de mails et discussions publiques, j'ai rencontré des hommes gays qui tentaient de trouver la guérison dans leur vie. Je me souviens d'un jeune homme qui était venu me voir après l'une de mes conférences. Il m'a remercié d'avoir parlé de la question de l'homosexualité avec compassion, sans le condamner. Il désirait suivre le Christ et recouvrer sa véritable identité, mais se sentait isolé et rejeté par certains membres de l'Église. Je n'ai fait aucun compromis dans mon discours, mais j'ai aussi parlé de la miséricorde de Dieu pour tous les pécheurs, et c'est la miséricorde du Christ qui l'a profondément touché. J'ai également cheminé avec d'autres personnes qui servent aujourd'hui le Seigneur fidèlement et ont abandonné leur mode de vie gay.

Voilà quelles sont ces âmes qui « cherchent le Seigneur » et sont de « bonne volonté », et personne ne devrait les juger.

Le nouveau vent de l'Esprit

Un vent nouveau souffle dans les voiles de la Barque de Saint Pierre. Le Pape François n'est ni Benoît XVI ni Jean Paul II. La raison est que le Christ nous dirige sur une nouvelle voie, bâtie sur les fondements posés par les prédécesseurs de François. Et pourtant, ce n'est pas du tout un nouveau chemin. C'est bien plutôt un authentique témoignage chrétien qui s'exprime dans un nouvel esprit d'amour et de courage. (Il ne s'agit que du perfectionnement de l'Evangile, siècle après siècle, ndt) Le monde a changé. Cela fait mal, terriblement. L'Église aujourd'hui doit s'adapter — non pas en abandonnant sa doctrine, mais en faisant de la place à sa table pour inviter tous les blessés de la vie. Elle doit devenir un hôpital de campagne pour tous. Jésus nous appelle, tout comme il appela Zachée, à regarder notre ennemi apparent dans les yeux et lui dire : « Descends vite : aujourd'hui il faut que j'aille demeurer dans ta maison. » [7] C'est le message du Pape François. Et que voyons-nous se produire ? François attire les pécheurs tout en secouant l'establishment... de la même manière que Jésus secoua les conservateurs de Son époque en attirant à Lui les collecteurs d'impôts et les prostituées.

Ce sont eux qui entreront avant nous dans le Royaume de Dieu ; non pas que Jésus prétendait que le Paradis est grand ouvert aux prostituées — ce qui fut l'objet certainement d'une controverse à Son époque aussi virulente que celles d'aujourd'hui avec François — mais qu'ils étaient souvent, de par leur vie brisée et leur absence de certitude quant à leur salut, plus enclins à accueillir avec amour et reconnaissance la miséricorde de Dieu — par opposition à certains juifs qui considéraient leur salut pour acquis parce qu'ils respectaient la loi tout en négligeant la plus grande de toutes qui est celle de la charité et de la miséricorde.

—Note de Pierre et les Loups

Le Pape François ne fait pas dévier l'Église des lignes de bataille de la guerre culturelle de notre siècle. Au contraire, il nous appelle aujourd'hui à nous équiper de différentes armes : les armes de la modestie, de la pauvreté, de la simplicité, de l'authenticité. Avec de tels moyens, si nous présentons Jésus au monde avec un visage d'amour authentique, la guérison et la réconciliation ont une chance de germer. Le monde peut accepter ou refuser de nous recevoir. Probablement, ils nous crucifieront... mais c'est alors, après que Jésus eut rendu Son dernier souffle, que le centurion romain finit par croire en Lui.

Pour conclure, les catholiques doivent réaffirmer leur confiance en l'Amiral de ce navire, le Christ lui-même. Jésus, non le pape, est Celui qui bâtit Son Église [8], la guide et la dirige siècle après siècle. Ecoutez le pape ; écoutez ses paroles ; priez pour lui. Il est le vicaire et le berger du Christ, qui nous a été donné pour nous nourrir et nous guider dans ces [derniers] temps. N'était-ce pas, après tout, la promesse du Christ ! [9]

Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l'emportera pas sur elle.

Mt 16: 18

Ce siècle a soif d'authenticité... Le monde réclame et attend de nous simplicité de vie, esprit de prière, charité envers tous, spécialement envers les petits et les pauvres, obéissance et humilité, détachement de nous-mêmes et renoncement. Sans cette marque de sainteté, notre parole fera difficilement son chemin dans le coeur de l'homme de ce temps. Elle risque d'être vaine et inféconde.

—Pape Paul VI, l'Évangélisation dans le monde moderne, Evangelii nuntiandi, n° 22, 76

Mark Mallett
Understanding Francis


[1] cf. la-croix.com ; Télécharger l'entretien au format PDF
[2] cf. Marc 2: 27
[3] cf. Brise fraîche
[4] lire la partie de l'entretien sous « L'Église ? Un hôpital de campagne » où le Pape François parle des confesseurs, faisant clairement remarquer que certains confesseurs commettent l'erreur de minimiser le péché.
[5] cf. la-croix.com ; lire aussi : « Le pape François compare l'avortement au recours à un "tueur à gages" » et « IVG : le pape dit son "horreur" et dénonce la "culture du déchet" »
[6] cf. The Washington Times
[7] cf. Come Down Zacchaeus, Lc 19: 5
[8] cf. Mt 16: 18
[9] cf. Jn 21: 15-19

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Commentaire laissé par Simon le

Bonjour Marie,

Avez-vous essayé de contacter Mark directement sur son blog ? (Il ne lit pas ce blog-ci étant donné qu'il ne parle pas français. Pour la même raison, vos deux références de forum francophones ne lui parleront pas je le crains : "LE PEUPLE DE LA PAIX" et "VIENS SEIGNEUR JESUS" - deux forum qu'il vaut mieux ne pas fréquenter si vous voulez mon avis !)

https://store.markmallett.com/contact-mark/

Mark est cependant fort occupé actuellement et il reçoit des centaines de mails chaque semaine donc peut difficilement répondre à tout le monde...

Si je peux néanmoins me permettre de vous répondre à sa place, vous avez entièrement raison et c'est ce qu'explique Mark dans nombre de ses articles dont j'ai déjà traduit certains sur ce blog.

https://www.pierre-et-les-loups.net/Mark-Mallett

Beaucoup de catholiques malheureusement ne réalisent pas qu'en critiquant et jugeant le Pape, qui plus est publiquement et sur Internet (au lieu de lui écrire respectueusement en privé ou de prier pour lui) ils se séparent de l'Eglise du Christ et entrent dans la fausse Eglise de l'Antéchrist (c'est bien en cela que consiste la lutte entre l'Eglise et l'anti-Eglise dont parlait Saint Jean-Paul II)

Beaucoup de catholiques se séparent également de l'Eglise à cause des scandales, ne réalisant pas que l'Eglise doit passer par le même chemin que le Christ, si on a persécuté Jésus on persécutera Son Eglise. Tout comme seul Saint Jean et Marie - ainsi que Marie Madeleine - étaient présents au pied de la Croix, devant Jésus défiguré et crucifié, aujourd'hui seuls quelques fidèles catholiques acceptent de rester au pied de l'Eglise crucifiée et défigurée. Je pense que c'est ce que Dieu cherche à faire aujourd'hui, déterminer qui est véritablement disciple de Jésus (au point de le suivre jusqu'au pied de la Croix) et qui ne l'est pas vraiment.

Il serait erroné de penser que seuls les catholiques tièdes et modernistes quitteront l'Eglise du Christ pour entrer dans la fausse église de l'Antéchrist et de son Faux prophète. Non, ce danger menace aussi les fidèles catholiques qui cependant s'imaginent que l'Eglise doit constamment être triomphante, et ils sont choqués de la voir persécutée et défigurée aujourd'hui par les scandales, blasphèmes et péchés de ses propres membres. Ils ne l'acceptent pas, certains se font débaptiser pour cette raison.

Comme le disait Benoit XVI, l'Eglise va devoir être purifiée, elle deviendra très petite, beaucoup de ses membres la quitteront pour X ou Y raison, seuls les fidèles élus resteront à son chevet pour ensuite entrer dans la prochaine Ere de paix et assister à la Résurrection et au Triomphe de l'Eglise. (Tout comme seuls les fidèles israélites purent entrer dans la Terre Promise, les autres moururent dans le désert... et nous sommes bien dans un désert aujourd'hui ! A nous de décider si nous voulons entrer dans la nouvelle Terre Promise : le temps de paix promis à Fatima !)

Combien se font malheureusement de plus en plus avoir par les ruses de Satan. Plutot que de prier et méditer ces événements et scandales qui nous dépassent tous dans leur coeur comme Marie, ils persécutent le Saint Père et sautent à la mer plutot que de rester avec lui dans le navire pour faire face à la Tempête.

Une autre chose à bien comprendre est que le Saint Père, successeur de Saint Pierre, est un homme, qui peut faillir (sauf dans ses enseignements ex cathedra où l'Esprit Saint l'empêche d'enseigner des hérésies). SEUL Jésus par l'Esprit Saint conduit l'Eglise, le Saint Père se tient à la barre mais c'est l'Esprit Saint qui souffle dans les voiles pour mener la Barque où Il veut. En dépit des échecs ou succès pastoraux de François (il n'appartient qu'à Dieu d'en juger, Dieu qui voit bien plus loin que nous) nous devons faire confiance à Jésus et à l'Esprit Saint. Mettons-nous notre foi dans un homme ou en Dieu ? Voilà la question que Dieu nous pose à tous, catholiques, aujourd'hui. Si nous faisons confiance à Dieu, ne jugeons pas le Pape, aimons le filialement, prions pour lui et prions Dieu pour qu'il donne à Son Vicaire le discernement nécessaire pour mener l'Eglise jusqu'à l'Ere de Paix.

C'est dans la faiblesse des hommes, dans leurs reniements, que Jésus agit avec le plus de puissance !

Je vous invite aussi à lire le Songe de Saint Jean Bosco sur les 3 Blancheurs.

Union de prière,

Simon

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Commentaire laissé par GRUIN le

Bonjour Mark,

Il est très difficile de vous joindre.

Ma dernière lettre, en anglais, est restée sans réponse. IT WAS VERY IMPORTANT.

ABOUT POPE, people mut know he is elected by HOLY SPIRIT and sins or trespasses are unpardonable.

SO, they must STOP PERSECUTE and SLANDER him.

What Jésus Says ? "Do not judge and you will not be judged"
What Mary says : "That your mouths are closed to all judgement, only God can Judge".

For me and many people, they are not christians.

Ex. : "LE PEUPLE DE LA PAIX"
Ex. : "VIENS SEIGNEUR JESUS"

Do they know who lead the world ? They infiltrated in Church (Vatican).

I can't write more. Sorry.

Marie from france

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Commentaire laissé par ps Joanne-Marie De la Croix le

Quelle merveille que ce texte ! Merci à vous de démystifier aussi bien les paroles de notre Saint Père !! Soyez béni ! Je prie pour vous pendant mes nuits d'Adoration devant le Seigneur ! Que l'Esprit Saint vous éclaire sans cesse !

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